21/12/2013

Quand Edouard Martin retourne sa veste ... par P.A. Reynaud

 

Florange, Martin, Hollande,

Contrairement à aujourd'hui, nous l'avions connu bien différent dans sa lutte acharnée pour sauver le site ArcelorMittal de Florange. Quelque peu trahi par Nicolas Sarkozy puis par François Hollande, il était devenu le leader de la défense des sans-grades, des petits ouvriers et en général de tous les salariés menacés par le grand patronat.

Cet homme, c'est Edouard Martin, le fougueux représentant de la CFDT des hauts-fourneaux mosellans devenu en quelques jours l'invité de toutes les chaînes de télévisions.

Condamnant Monsieur Mittal par des propos violents, puis prenant à partie François Hollande, Président de la République, il n'hésite pas en décembre 2012 à s'adresser à ce dernier directement à la télévision en employant ces mots grinçants : « Nous allons être votre malheur si vous ne cessez pas votre mensonge ! ».

Indéniablement, l'homme a parfaitement le sens de la formule et se positionne comme un meneur d'hommes très prisé des médias.

Pour la plupart des salariés du groupe ArcelorMittal, Edouard Martin devient alors un symbole, une sorte d'icône social qui n'a peur de rien, reproduisant l'image de la lutte des classes contre les « voyous » de l'industrie et de la finance. En quelque sorte, un Etienne Lantier sorti tout droit de de Germinal … Il faut dire que Martin fait rêver la classe ouvrière : l'espoir de reconquérir Florange, l'espoir de faire plier l'homme d'affaires indien Lakshmi Mittal, industriel et président d'Arcelor, l'espoir de gagner une grande bataille sociale.

Au final, rien ne se passe et le syndicaliste CFDT de chez Mittal se fait soudain plus modéré et s'offre même la publication d'un livre « ne lâchons rien » un titre grandement prometteur … histoire de donner un vrai statut à sa notoriété déjà bien relayée par le monde médiatique.

Inutile de préciser que ce livre s'est très bien vendu !

En fait, Edouard Martin prépare déjà sa reconversion : le passage d'une classe prolétarienne à celle de la politique avec les avantages matériels et financiers que cela comporte.

Aujourd'hui c'est réussi. Le « petit ouvrier » de Florange passe dans la cour des grands. Il entre en politique, non pas par la petite porte, mais en tant que tête de liste du PS aux élections européennes de mai 2014 dans la région Grand-Est. Incroyable, non ?

Sans complexe, après avoir violemment critiqué François Hollande et son équipe, il cautionne désormais le Parti socialiste pour assurer son propre avenir … mais très certainement pas celui des autres.

A cette heure, la déception est bien présente chez de nombreux syndicalistes. Et si Monsieur Martin, futur député européen estime n'avoir aucune leçon à recevoir de qui que ce soit, il n'en reste pas moins vrai que la plupart de ses anciens camarades considère qu'il trahi ses amis, comme il a trahi également ses idées et ses engagements.

Devenir député européen, c'est entrer dans un système politique très prisé où « la soupe estbonne ». Edouard Martin l'a parfaitement compris, et abandonnant le bleu de chauffe pour le costume branché, il se créé aujourd'hui un bel avenir avec l'appui inconditionnel du PS sans oublier la forte respectabilité dont il va jouir dans les milieux politiques.

Ainsi, pendant que Monsieur Martin siégera au Parlement européen dans la quiétude et le confort réservé aux députés, ses anciens collègues de travail traîneront la savate devant les bureaux de Pôle Emploi en attendant un hypothétique travail ou simplement un « sale petit boulot ».

Cet exemple parmi tant d'autres révèle bien le peu d'intérêt qu'une majorité de responsables syndicaux accorde à leurs compagnons de route, préférant privilégier leur carrière et leurs ambitions personnelles au lieu de prendre la défense des intérêts généraux des travailleurs.

Mais ce n'est pas nouveau, et au fond ce qui est regrettable, c'est la duplicité d'un syndicalisme complaisant avec le pouvoir, phénomène que l'on a toujours rencontré au fil des décennies passées.

Et lorsque certains faits délictueux réels seraient susceptibles de « faire sauter la République », les syndicalistes sont toujours présents pour tempérer les esprits afin de protéger le pouvoir politique du moment.

Pierre-Alain Reynaud

Site internet :www.pierre-alain-reynaud.com

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